Les Olympiades, j’en ai entendu parler il y a des jours. Les gens me rabâchaient les oreilles avec ça, me relatant maintes anecdotes cocasses quant à celles de l’an dernier. Si je me fie aux dires d’à peu près tout le monde, c’est l’occasion rêvée de s’amuser, de se détendre et d’oublier tous les travaux et examens à venir l’espace d’un weekend. Une petite escapade sans même quitter Columbia, au fond. Exactement ce dont j’ai besoin après ce début de session mouvementé. L’adaptation a été difficile, particulièrement parce que je vivais encore le deuil de mes deux parents, mais aussi à cause de cette fichue jambe de pirate. Un petit bout de moi qui est parti, emportant avec lui tous mes rêves et tous les objectifs que je m’étais fixée. Adieu cheerleading, adieu gymnastique et adieu pilotage. C’est ce que je me répétais sans cesse dans les semaines suivant mon arrivée dans la grosse pomme. Certes, je ne suis plus aussi pessimiste. Grâce à certaines personnes, je commence à m’adapter à cette nouvelle vie. Avec l’aide de Carter, par exemple, j’ai espoir d’un jour rejoindre l’équipe de cheer. Je sais que ce ne sera plus comme avant, que je ne pourrai plus faire toutes les pirouettes, tous les sauts, ni être au sommet de la pyramide, mais c’est une petite victoire parmi d’autres qui rend mon quotidien de plus en plus bon. Repenser à l’Italie ne me fait plus monter les larmes aux yeux malgré la pointe de nostalgie qui subsiste. Bref, les choses s’améliorent. Je suis heureuse, mais parfois, il suffit d’un moment pour que tout bascule. La vue de son visage en fait partie. Celle qui s’en est prise à moi sans raison particulière, dans un supermarché aux petites heures du matin. J’ignore si elle avait la gueule de bois, si elle venait de se faire tromper ou si elle est simplement mesquine. La raison de l’affront m’importe peu. Tout ce que je sais, c’est qu’elle aussi m’a prise sous un mauvais jour, assez pour que je m’en souvienne et que je lui en veuille encore. Je me demande si elle m’a oubliée. Ne redoutant pas de l’apprendre, je m’approche de la brune. Une Delta aussi belle que prétentieuse. « Reece, non? » Je me plante devant elle, le visage impassible. « Ludovica. Je ne sais pas si tu te souviens de moi? J'ai eu la chance de te croiser au supermarché. L’allée quatre, celle des produits ménagers! » Je me souviens qu’elle avait une boîte de kleenex entre les mains lorsque je l’ai accidentellement percutée. La maladresse était due à ma prothèse et à un fil électrique qui trainait, mais l’excuse ne lui suffisait pas. « Je te trouve resplendissante! J’te jure, les yeux bouffis, ce n’était pas un look pour toi. » Je lui adresse un grand sourire, battant pratiquement des cils pour appuyer le compliment. « La Varpa, ça te dit? Je comprendrais si tu ne veux pas abîmer ta coiffure » Je ne suis plus comme avant. Quand les gens s’en prennent à moi, je ne cours plus dans les jupes de papa en pleurant -je ne pourrais plus jamais de toute façon-, je les confronte. Verbalement, évidemment. À moins que l’autre s’en soit pris à un proche, jamais je n’userais de violence physique. Je ne le supporterais pas et je m’en voudrais probablement longtemps.
And when you start to feel the rush. A crimson headache, aching blush and you surrender to the touch, you'll know. I can put on a show, I can put on a show. Don't you see what you're finding? This is Heaven in hiding.
Les dernières semaines étaient très difficiles pour toi. En rentrant de ton petit séjour à Bali, tu as été affrontée à une nouvelle extrêmement douloureuse. Tu ne t’étais pas attendue à ce que Joshua sorte de ta vie d’une manière si brutale, si surprenante et c’était un vrai choc pour toi. Ce n’est pas facile de balancer aux oubliettes une année et demi de ta vie. Une année et demi d’évolution, de promesses d’un avenir meilleur et rassurant. Finalement, même si tu as été accablée par la finalité de cette relation, tu en es sortie bien plus forte qu’avant. Mais avant de tirer cette conclusion positive, tu as gravement vacillé Reece. Tu as d’abord préféré quitter ton appartement et colocation pour te réfugier dans une chambre d’hôtel. Une semaine entière sans donner de nouvelles à personne. Une semaine entière à pleurer, à crier, à l’insulter et à t’insulter toi-même. T’avais besoin de cette solitude pour faire le point avec toi-même. Ta soeur avait averti la police de ta disparition, ta meilleure ne t’adresse plus la parole, ton grand-père n’arrive pas à oublier le fait que tu avais choisi Joshua à lui … plein de petits détails qu’avaient fait en sorte de te pourrir davantage le moral. Tu as besoin de décompresser et quoi de mieux qu’une petite compétition au sein des Olympiades ? En suivant cet état d’esprit, tu t’es inscrite à une épreuve sans t’attendre à revoir cette tête blonde. Elle t’adresse la parole sous ton air bonnement hautain. Ce n’est pas le moment de te faire chier, clairement. Mais en même temps … tu l’as un peu trop cherché. Quelques jours en arrière, elle t’avait bousculé au supermarché et tu avais réagi d’une manière extrêmement virulente. Sur le coup, tu ne t’es pas sentie coupable mais plus tard … oui, tu t’es mordu la lèvre, en te disant que cette jeune femme n’était pas à l’origine de tous tes malheurs. Sauf que, vu son entrée dans la matière, tu oublies les bienséances ainsi que tes regrets ; si elle veut la guerre, elle l’aura. " Oui je m’en souviens. Ton sourire niais m’a donné des cauchemars. " Tu ne grimaces pas, tu ne souris pas, tu reprends cette plastique de jeune femme inaccessible et imperturbable. Pourtant, tu pensais avoir fait un trait sur elle, maintenant elle revient encore plus insupportable qu’avant. Sa remarque te fait légèrement tiqué, ce à quoi tu réponds par le silence. Tu n’es pas là pour disputer une nouvelle fois avec elle. Tu n’es pas là pour perdre ton temps dans ce genre de choses. Tu t’apprêtes à partir, à chercher un adversaire avant qu’elle ne se propose justement pour remplir cette place vacante. Tu la regardes alors de haut en bas. " A ta place, je m’inquièterai plus pour ma dignité, elle sera bientôt écrasée par mes jolies mains. " Mains que tu fais doucement secouer, lui offrant pour la première un simulacre de sourire malveillant. Tu lui tournes le dos, marchant déjà vers le terrain de jeu. " Tu viens me montrer ce que tu as dans le ventre ? " En réalité, tu n’es pas si confiante. Même si tu es une grande sportive, tu ne t’es jamais amusée à prendre part aux jeux Vikings. Là, c’est une première et ta performance doit être à la hauteur de tes menaces.