Je me balade d’un coté à l’autre du salon, sans savoir si je dois rire ou pleurer à ce que ma mère me raconte. Ils ont une grande maison, mes parents, mais c’est sur que vivre l’un sur l’autre, ce n’est pas facile. Parfois j’aimerais être confinée avec eux, juste pour voir ce que ça donne. Enfin non, ce n’est pas plus mal d’être loin … Surtout quand maman commence à me parler de garçons.
Mais enfin ... dis-je en tentant de la stopper. Mais c’est un flot de paroles continues qui sortent de sa bouche. Elle me parle du fils des voisins qui est devenu un beau jeune homme, de cet infirmier qu’elle a croisé lors d’un de ses rendez vous et qui ferait un très bon parti pour moi. Elle se met ensuite à me demander si j’ai croisé quelqu’un dans mon immeuble, dans ma rue, dans mon quartier.
Maman … Maman ! Arrête, qui veux-tu que je rencontre coincée dans mon appartement ? J’y arrive enfin, j’arrive à prononcer une phrase complète. Je suis chez moi à 90 pourcents, je n’ai aucuns soucis qui demande une aide extérieur et je connais un peu près tous mes voisins qui sont plus âgés que moi. Mais ce sont les mamans, elles ne veulent que le bien de leur petite fille, elles veulent juste le meilleur parti possible. J’ai envie de lui assurer que je saurais le faire comme une grande fille, mais c’est peine perdue.
Oui, promis, je te le raconterais si j’ai quelqu’un. Je dois avouer que je me suis perdue dans la conversation, que je lui promets peut être quelque chose que je ne pourrais faire. C’est pas grave, je me rattraperais plus tard.
Bon maman, je dois retourner bosser. On se rappelle demain ? Je lui envois plein de bisous, lui demande de faire la même chose pour papa et je peux enfin me mettre à penser à autre chose que des attributs masculins.
J’aime ma mère du plus profond de mon cœur mais il faut toujours que je prenne mon courage à deux mains pour mettre fin à une conversation qui dérive beaucoup trop. Je m’affale sur le fauteuil et souffle de grands coups, la tête pleine de bourdonnements. Je réfléchis à la suite à toute vitesse et ignore comment j’en arrive à mon idée mais elle est là et j’apprécie assez. C’est en pensant à mes voisins que j’en suis venue à penser à Solveig, une véritable voisine et amie. Ne voulant pas simplement frapper à sa porte pour discuter ; je vaux bien mieux que ces banalités, je cherche une solution et me vient l’idée d’une bonne tasse de café. Ce serait un peu comme si nous étions sur une terrasse, à discuter des associations, de sports ou simplement de la pluie et du beau temps. Ce serait juste à nos entrée et avec une bonne distance. Sympa quoi.
J’ai deux options quand je veux me faire du café : une cafetière, tout est fait à la main et le goût est plus fort ou alors, comme sûrement la moitié de la population de cette planète, j’ai une machine Nespresso. Je dois oublier ma première option parce que je n’en ai plus, je me lance alors vers les capsules et fais couler deux cafés en moins de deux. Si je mets un nuage de lait ainsi qu’un demi sucre dans le mien, j’ignore comment Solveig prend le sien. Je prépare alors un plateau, j’y pose les deux tasses, la boite de sucre et la petite bouteille de lait. Je l’emporte jusqu’à l’entrée, ouvre la porte et dépose le plateau devant la porte de ma voisine. Je prends ma tasse, sonne à sa porte et recule jusque la mienne.
Salut. dis-je alors que la brune ouvre la porte. Je souris, contente de la voir, contente d’avoir un peu de compagnie. Solveig fait partie de ces femmes plus âgées avec qui j’aime parler, avec lesquelles j’ai des centres d’intérêts. Puis elle ne passe pas son temps à se plaindre de son age ou quoi, profitant simplement du moment présent. Je la trouve rafraîchissante et c’est pour ça que je n’ai pas hésité à lui offrir cette petite tasse de café.
Je ne savais pas comment tu prenais ton café alors je t’ai mis ce qu’il fallait. ajoutais-je, faisant un geste de la main vers le plateau. Se fondre dans la masse a toujours été une priorité, mais j’aime le faire avec du charme et de l’originalité. Je rigole, visiblement assez fatiguée pour m’amuser de moi même.
J’ai longtemps réfléchi à mon coup, j’espère que c’est bien réussi. Je l’observe se pencher et se servir, continuant de présenter mon œuvre comme si j’avais rendu le meilleur devoir de ma vie. C’est un peu ça à chaque fois que j’essaie quelque chose, depuis que je suis sortie de ma bulle, je commence à penser que c’est exceptionnel avant de me rappeler que c’est juste un comportement normal. Humain. Et c’est ce qui fini par arriver quelques secondes plus tard.
Tu vas bien ? finis-je par demander, juste avant de boire ma première gorgée.