Je ne peux m'empêcher de faire entendre un tout petit rire en écoutant Aleksej me dire qu'il craint de retomber dans sa routine de mâle célibataire sous prétexte que la jeune femme rentre chez elle sous peu. Il n'a donc pas conscience de ce qui l'attend. Sa naïveté me fait sourire. Nous autres, les femmes, ne cessons de prendre des nouvelles pour être sûres et certaines qu'on ne nous oublie pas et ce, même après une mise à distance de l'autre.

- Rassure-toi, je suis presque certaine que ça n'arrivera pas.

Parce que je pense qu'il est important qu'on aille au bout des choses concernant le sujet « Solveig », je fais mine de ne pas avoir entendu ce qu'il vient de dire au sujet de « mon dossier ». Là-dessus, on en parlera le moment venu et clairement maintenant n'est pas bien choisi. Je tiens à rassurer mon ami comme il s'efforce de le faire depuis des mois tandis que j'essuie échec sur échec.

Je lui souris quand il me fait un clin d’œil en disant que je fais partie des bonnes choses lui étant arrivé dans la vie. Entendre une telle chose me fait chaud au cœur mais, là aussi, je décide de ne pas appuyer ce sujet. Notre amitié se consolide au fil des mois qui passe, il serait impensable de dire le contraire mais je ne veux pas qu'Aleksej se serve de cela pour qu'on finisse par passer à autre chose.

- Elle a changé ton quotidien et c'est important mais cela ne veut pas pour autant dire que tu dois tout changer dans ta vie de A à Z, d'accord ? Votre relation est tout nouvelle encore, il faut prendre le temps de faire les choses tranquillement. Un pas après l'autre, comme on dit. Oui, il est possible qu'elle te fasse souffrir mais l'inverse est tout aussi plausible. Tu as beau être un homme formidable, Aleks ; cela ne veut pas pour autant dire que tu ne feras pas une erreur. C'est pour cela qu'il faut appuyer sur la pédale de frein et qu'il n'est pas si mal qu'elle rentre chez elle.

J'espère que mes paroles ne vont pas le choquer. Je veux me montrer honnête mais sans  le blesser. Je me détesterai si je faisais une chose pareille à quelqu'un comme Aleksej.

- J'aimerai ne pas avoir à le faire mais...je ne peux pas m'en empêcher. Qu'est-ce qui se passe au niveau de ton travail ? Qu'est-ce qui ne te plaît plus ?

Aleksej observa Callie quelques secondes quand elle lui assura qu’il n’avait pas de souci à se faire concernant sa routine. Elle était parfois tellement sûre d’elle, ce qui renforçait son impression d’incompréhension envers les femmes. Comme si elles partageaient un secret inaccessible pour les hommes, en tout cas pour lui. Il grimaça en l’écoutant parler. Bien sûr il ne devait pas changer sa vie, mais peut-être qu’il en avait envie. Son front se serra quand elle évoqua le fait qu’il pourrait également la blesser. Commettre des erreurs, dans le petit mon d’Aleksej Svendsen était quelque chose de plus ou moins inadmissible.

Et quand Callie lui disait d’appuyer sur la pédale de frein, l’idée lui paraissait tout aussi abstraite. Il n’avait pas l’impression d’avancer. Il avait l’impression qu’à chaque pas en avant, il faisait deux pas en arrière. Il savait que cette idée n’était pas tout à fait juste. Mais c’était la manière dont il le percevait actuellement. Mais Solveig lui tenait le même genre de discours. L’entendre d’une autre bouche lui montrait que son jugement était peut-être erroné.

« Mmmm… la pédale de frein… ce n’est pas la première fois que j’entends ça… »

Il savait qu’elle avait raison. C’était souvent le cas. Ça ne rendait pas la pilule plus agréable à faire passer. Il soupira une nouvelle fois, frottant son visage. Il savait également que la meilleure solution serait d’en parler à la principale intéressée mais n’était-ce pas une perte de temps ? Leur discours ne changerait pas, ni à l’un ni à l’autre. Il ne voulait pas qu’elle parte, elle avait besoin de retrouver son équilibre. Quand Callie changea de sujet, il était presque soulagé.

« J’ai l’impression de tourner en rond. Je ne regrette pas mes choix de carrière. Je sais que j’avais de bonnes raisons. J’étais un jeune homme ambitieux, je voulais pouvoir apporter un certain confort de vie à ma famille… ça avait du sens… aujourd’hui plus tellement… »

Il repensait à cette soirée, il y avait quelques semaines de cela, où il avait retrouvé son ancien badge d’assistant du procureur. Les paroles de sa fille à l’époque. Aujourd’hui elles résonnaient dans sa tête sous un nouvel éclairage. Lui qui avait placé toute sa foi en la justice, qui croyait dur comme faire dans les lois et leur respect, commençait à se demander s’il les servaient réellement à la mesure de ses principes. La décision que Solveig avait prise vis-à-vis de son offre de travail l’avait également beaucoup fait réfléchir et se remettre en question. Quel genre d’avocat voulait-il être ? Et surtout, quel genre d’homme ?

Entendre Aleksej commencer à émettre des doutes quant à l'utilité de sa fonction m'inquiète un peu. Au vu de la situation dans laquelle je suis plongée d'un point de vue professionnel depuis le début de la crise sanitaire mondiale, je refuse d'entendre Aleksej parler aussi négativement de sa carrière que je sais particulièrement brillante.

- Tu ne quand même comptes pas arrêter, si ?

Même si j'ai conscience que c'est un peu égoïste de ma part, je ne veux pas entendre mon ami me dire qu'il va laisser tomber ce pour quoi il est doué, pour quoi il est fait aussi. Je pense sincèrement que cet homme est fait pour être un homme de Loi, je ne l'imagine pas être autre chose de ça.

- Je sais que tu es passé par des choses terribles, Aleks. Mais n'oublie jamais l'homme incroyable que tu es, d'accord ? Personnellement comme professionnellement. Tous ces bouleversements te prennent probablement de court mais ne te laisse pas envahir par tes émotions trop vite, d'accord ?

Cependant, cela ne doit pas obliger l'homme à rester dans un chemin qui ne lui convient plus.

- Imaginons que tu arrêtes, que ferais-tu à la place ?

C'est un peu idiot mais je n'imagine pas Aleksej dans autre chose bien que je ne doute pas un instant qu'il soit capable de faire des centaines de choses différentes de la meilleure des manières.

Quand Aleksej constata l’expression sur le visage de Callie, il posa instinctivement sa main sur la sienne pour la rassurer. Il était peut-être un peu désorienté en ce moment, certes, mais pas au point de prendre quelque décision démesurée. Sauf peut-être en ce qui concernait Solveig, mais c’était un autre sujet. Mais ses crises de panique, les mois de thérapie avec sa psy, remettait également en question certains de ses choix.

« Je ne vais pas quitter mon job du jour au lendemain, si c’est ça qui t’inquiète… Je ne pourrais jamais faire ça à mon associé de toute façon. Charles est au moins autant responsable de mon succès que je le suis. Mais c’est une question que je me pose… »

Il lui sourit alors. Il ne voulait pas qu’elle pense qu’il s’emballait et qu’il agirait de manière impulsive. Mais il est vrai qu’avoir passé du temps à chercher des solutions pour elle lui avait donné un sentiment d’accomplissement bien différent de ce qu’il ressentait à présent dans son travail. Et s’il n’avait jamais laissé cette idée devenir trop concrète, elle était là depuis un certain temps déjà. Il n’avait jamais voulu considérer cette option jusqu’à présent mais un évènement avait bel et bien changé la donne. La nomination d’Eric Schneiderman comme Procureur Général de New York.

Aleksej et Eric avait collaboré plusieurs années, quand le premier était simple assistant et le second adjoint. Schneiderman s’était battu contre le procureur en place qui avait un faible pour les pots de vin et une capacité particulière pour fermer les yeux sur un certain nombre de cas de corruption. À cette époque, quand il avait fallut choisir entre rester au cabinet et partir chez Svenssen, Eric avait poussé le jeune danois à voguer vers d’autres horizons. Sa carrière était encore trop fragile pour s’attaquer à un problème comme la corruption, surtout au sein des institutions.

Des années après, Schneiderman avait finalement réussi à force de ténacité à prendre la place qui lui revenait de droit. Jamais la ville de New York ne s’était doté d’un si gros atout. Et à présent, il souhaitait qu’Aleksei reviennent travailler à ses côtés.

« Je ne compterais pas m’arrêter, uniquement changer de combat… retrouver un chemin plus vertueux… J’ai été approché à plusieurs reprises par le bureau du procureur. L’idée me trotte dans la tête depuis un certain temps… Je n’était peut-être juste pas prêt à la considérer jusqu’à maintenant. »

- Quoi ? Mais Aleks c'est incroyable ! Le bureau du Procureur !

Ma spontanéité prend tout le monde de court car même Brayon tourne la tête vers moi alors qu'il semblait jusqu'alors passionné par sa voiture télécommandée. Je lui fais un clin d’œil et il repart aussitôt dans ses fantaisies motorisées. Heureusement que cet enfant est habitué à mes « coups de folie » sans quoi, Dieu sait dans quel état le petit finirait.

- Ce serait formidable, je veux dire...c'est une opportunité que tu ne peux pas refuser si on te la présente.

J'en viens à me demander ce que cela pourrait entraîner. Est-ce qu'il serait plus occupé ? Serait-il dans l'impossibilité de venir tous les matins au café comme il le fait maintenant depuis des années ? Je sais que c'est égoïste mais je détesterai perdre Aleksej comme client. J'ai conscience que notre amitié ne changerait probablement pas mais s'il venait à ne plus être en mesure de se présenter, cela me ferait de la peine.

- Tu viendras toujours boire ton café dans mon humble demeure ?

Nous n'en avons pas parlé. Pas encore. Mais je sais qu'il va être temps que je lui dise ce que j'ai décidé. Je ne pourrais pas éviter le sujet encore longtemps. La vie semble avoir pris des décisions pour moi, des décisions auxquelles je dois me plier sans rechigner.

- Et ce...même s'il n'est plus au même endroit ?

Oui, j'ai décidé d'accepter la proposition des Lockwood. Oh, évidemment, ce n'est pas un choix facile mais il est temps que j'admette avoir perdu cette bataille et des batailles, j'en ai tellement mené que cette fois, je décide de laisser tomber.

Un grand sourire se dessina sur le visage du danois en voyant la réaction de Callie. Il se mordit timidement la lèvre. Si Aleksej était très fier de sa carrière, du parcours qu’il avait fait, il savait qu’il le devait à son travail et gardait toujours une certaine humilité vis à vis de ça. Travailler pour le bureau du procureur avait un certain cachet, c’était indéniable. Mais c’était également sortir d’un certain cercle un peu huppé de New York et ce n’était pas pour lui déplaire. L’enthousiasme de son ami lui réchauffait le coeur.

« Disons que c’est un offre à prendre en considération, sérieusement. »

Ce n’était pas une décision qu’il pourrait prendre à la légère. Il était associé dans sa firme, il faisait partie du haut de la pyramide. Une telle offre remettait un certain nombre de choses en question. Le salaire étant l’une d’elle. Eric ne pouvait pas s’offrir les services d’Aleskej. Ce serait donc au danois de décider de gagner moins s’il acceptait de le suivre. Et la différente était assez conséquente pour faire pencher la balance.

Le rythme de travail non plus ne serait pas le même. Travailler au bureau du procureur demandait un investissement différent. Ce point là était autant un inconvénient qu’un avantage. Il pourrait faire une croix sur des horaires de bureau, mais déjà à l’époque il aimait le travail de terrain. Finis la bureaucratie.

« Doucement… on y est pas encore, va… je n’ai aucune idée de la teneur de l’offre. J’ai accepté un rendez-vous avec Eric la semaine prochaine. »

Il avait bien une petite idée cependant. Mais il ne mettrait pas de mots dessus tant qu’il n’aurait pas été face à son ancien collègue. Et puis quitter Svenssen et Associate n’était pas une décision facile à prendre. Il y avait une question d’affect. Il y avait Charles. Son mentor, son ami. S’il en était là aujourd’hui, c’était à cet homme qu’il devait tout.

Il pencha légèrement la tête en observant Callie alors qu’elle venait d’aborder un sujet qu’elle avait longuement évité depuis plusieurs semaines. Elle avait finalement changé de cap. Rien d’étonnant après avoir donné naissance à son deuxième enfant. On avait beau avoir des principes, des ambitions, l’arrivée d’un enfant remettait généralement beaucoup de choses en question. Et si elle pensait que c’était ce qu’il y avait de mieux à faire pour eux, il ne pouvait que la soutenir.
Il lui adressa un nouveau sourire complice.

« Oh moi… tu sais… j’irais au bout du monde pour ton café, min kære… »

Au vu de la spirale récessionniste dans laquelle nous semblons être en train de plonger, j'ai finalement compris que l'offre de Lockwood n'était plus à prendre à la légère ou à balayer d'un simple revers de manche.
Alors, je les ai appelé. Oui, j'ai littéralement pris mon courage à deux mains et j'ai appelé celui qui veut plus ou moins faire couler mon business. Je crois que personne ne sera aujourd'hui en mesure de prétendre que je ne suis pas une femme courageuse.
Nul besoin de dire qu'ils étaient fiers comme dans des paons quand ils m'ont entendu demander si l'offre proposée avant la crise tenait toujours. Ils m'ont assuré que oui, qu'elle était au même taux et qu'ils allaient me faire une offre écrite envoyée par la voie postale. Bref, ces enfoirés rentrent dans les clous une bonne fois pour toute vis-à-vis de cette histoire. C'est donc une véritable fin de partie pour moi.

- C'est une bonne nouvelle parce que je vais avoir besoin de vos services, Monsieur, dis-je en lui adressant un clin d’œil.

Eh oui. Accepter l'offre des Lockwood est une chose mais parvenir à déménager mon activité sans perdre ma cliente va en être une autre. Il va me falloir faire preuve d'une communication imparable et, bien-sûr, trouver un local qui en vaille le coup sans trop m'éloigner du lieu initial si possible.

- Tu ne connaîtrais pas des propriétaires en manque d'acheteurs pour leur local pro, par hasard ?

Oui, je me lance maintenant dans une nouvelle bataille et pas des moindres. Lockwood me donne jusqu'à la fin de l'année pour partir. Il serait presque charitable. Presque.

Quelque soit le choix de Callie, c’était une bonne chose qu’elle ait arrêté sa décision. L’incertitude restait probablement la moins agréable des position. Maintenant elle pourrait se projeter, avoir de nouveaux projets, avancer. C’était un élan de fraîcheur pour lui aussi. Une nouvelle raison de se réjouir. Une de plus qui lui faisait réaliser qu’il pourrait commencer à relâcher la tension, qu’il y avait de jolies choses qui se passaient dans sa vie et que s’il continuait à stresser sans arrêt, il passerait à côté.

« Tu sais bien que je suis toujours partant ! »

Il sourit à l’évocation de sa question. Ces dernières semaines, le Callie’s avait occupé un certain nombre de ses soirées. Les discussions avec Solveig s’était multipliées. Au départ, il s’agissait surtout de réfléchir à voix haute, d’avoir un point de vue extérieur pour confronter le sien. Mais rapidement la jeune femme s’y était intéressé, proposant des solutions nouvelles, des idées innovantes. Elle avait l’enthousiasme de son âge, ce qu’Aleksej avait oublié au fil des années, s’enfermant dans son mode de vie et de pensée. La bonne nouvelle était que c’était contagieux.

« Je ne voulais rien laissé au hasard alors j’ai fait quelques recherches… enfin, c’est à Solveig que revient le mérite, pour être franc… C’est elle qui à mis cette éventualité sur la table… »

Aleksej qui avait pour habitude de compartimenter tous les aspects de sa vie se rendait peu à peu compte qu’il n’aurait bientôt plus d’autre choix que d’accepter d’ouvrir certaines portes. L’amitié qui le liait à Callie était forte, la suite logique des évènements serait probablement de lui présenter la femme qu’il considérait à présent comme sa petite amie. Bien qu’aucune étiquette n’est jamais été mise sur leur relation.

« Elle a de bonnes idées… peut-être que… hum… elle voulait ton numéro de téléphone pour t’en parler alors… ce serait peut-être le moment que je te la présente… »

Je suis touchée de constater que je reste une véritable préoccupation pour mon ami mais je ne pensais pas que cela irait jusqu'à ce que je devienne un sujet de conversation avec sa nouvelle compagne. Me voilà un peu gênée maintenant. Je n'ai aucune envie qu'Aleksej se prenne la tête avec mes ennuis et ce, même si je sais qu'il est mon ami et qu'il souhaite le meilleur pour moi. Malheureusement, parfois, même si on le souhaite, il y a des choses que l'on ne peut pas faire pour les autres. C'est aux autres, justement, de se prendre en main et de faire en sorte que les choses prennent une tournure différente et ce, même si c'est difficile.

Il évoque Solveig avec tant de respect et de courtoisie que je commence à me dire que ce n'est pas une simple amourette. Il l'a déjà dans la peau et même si je n'en dirai rien, cela m'inquiète un peu. Encore une fois, je ne veux pas le voir souffrir bien que je n'ai aucun contrôle là-dessus.

- Tu pourrais, en effet, réponds-je simplement.

Si son amie veut m'aider, je ne vais pas cracher dans la soupe. Ce n'est pas le moment. Toute aide sera la bienvenue en ces temps difficiles. Je sais peu de cette femme mais elle a une carrière impressionnante aussi (autant dire qu'Aleksej et elle semblent s'être bien trouvés sur ce point) donc j'imagine pouvoir lui faire confiance d'un point de vue professionnel.

- Sauf si ça te gêne. Tu n'es forcé à rien, tu sais ?

Je connais suffisamment Aleksej pour comprendre sans qu'il ait vraiment besoin de me le dire que le fait que je puisse rencontrer « officiellement » Solveig le met mal à l'aise. Il est du genre à compartimenter sa vie et je pense que mélanger deux pans de sa vie risque de lui faire un peu peur. Cela engagerait une notion de sérieux à laquelle il n'est évidemment plus habitué, divorcé depuis plus d'une dizaine d'années maintenant.

Ce sentiment de satisfaction qu’il avait ressenti en faisait des recherches pour Callie, cette impression de se sentir utile, de mettre ses compétences au service des autres. C’était quelque chose qu’il n’avait pas ressenti depuis longtemps. C’était peut-être un peu égoïste au fond. Mais il n’était pas prêt à la laisser tomber. Et même si sa vie prenait une tournure inédite, elle avait été présente chaque matin, ne serait-ce qu’un sourire quotidien pendant des années, alors non, il n’arrêtera pas de se préoccuper de son sort.

« Je sens une pointe de scepticisme dans ta voix… »

Aleksej et Callie avait ce point en commun de rarement faire dans la demi-mesure. Sa réaction vis-à-vis du bureau du procureur en était d’ailleurs un bon exemple. Sa réaction modéré n’était pas quelque chose dont il avait l’habitude. Il fronça légèrement les sourcils, tentant de masquer son trouble. Il y avait quelque chose qu’elle ne lui disait pas. Il s’était plutôt attendu à de l’enthousiasme. Solveig était brillante, sa contribution ne pourrait être que positive.

« Tu sais… malgré tout mes doutes ou mes angoisses… je suis bien avec elle… et la majeure partie du temps, elle me rend heureux… et c’est quelque chose que j’ai envie de partager… »

C’était un poids qu’il venait de faire tomber de sa poitrine. Oui, elle le rendait heureux. Et maintenant qu’il avait finalement décidé de s’autoriser à nouveau ce genre de sentiment il n’était plus question de faire machine arrière. Il avait passé quasiment quinze ans à se punir, à se refuser la moindre petite idée de bonheur. Aujourd’hui, il avait envie de se laisser y croire. Peu importait les conséquences. Il avait l’impression que le jeu en valait la chandelle. Il était intimement convaincu que Solveig valait de prendre tous les risques.

« Mais c’est ta décision, évidemment… Il s’agit de ton avenir. Et même si tu m’y fais une petite place, je ne te forcerais jamais à accepter quoi que ce soit ou qui que ce soit… Cela dit tu comptes beaucoup pour moi, et elle aussi. Alors j’imagine que… ça me ferait plaisir. »