Sécher les cours n’a jamais été dans son habitude, elle n’a jamais aimé ça non plus. Pourtant, là, voilà qu’elle fait comme tous ces étudiants qui préfèrent passer leur temps à l’extérieur plutôt que dans les salles de cours. Elle sait qu’elle le regrettera tôt ou tard. Elle est en dernière année Carter, dernière année à Columbia en tant qu’étudiante en tout cas. Elle aimerait être titularisée là-bas un jour, ça serait sans doutes trop beau pour être vrai, mais faut bien y croire. Alors la voilà dans un café alors qu’elle devrait être à un cours. Elle profite de ce temps qui n’est pas si désagréable pour être en terrasse, pour simplement ne rien faire. Elle a beau être une fille forte, qui résiste à toutes les épreuves de la vie, elle a conscience que parfois, ce n’est qu’une simple façade. Elle voudrait que ça soit réel, tout le temps mais pour l’heure elle doit juste faire face, elle doit juste prendre du temps pour elle aussi. C’est vrai qu’après tout, elle ne sort pas, elle ne sort plus comme elle a pu le faire dans ses premières années. Faut dire aussi que ce n’est pas le même travail qu’elle a à faire. Plus de responsabilités, plus de tout en fin de compte. Faut qu’elle se rende à l’évidence l’étudiante, rien ne sera plus jamais comme avant, rien ne sera jamais plus comme lorsqu’elle était enfant, que tout allait encore à peu prêt bien avec son frère et sa soeur. Elle soupire, termine sa boisson aussi avant de se lever pour aller recommander quelque chose. Mais elle est dans ses pensées, elle est ailleurs et ne voit pas qu’il y quelqu’un qui arrive en face d’elle. Elle a au moins la chance de savoir tenir debout en toute circonstances avec des talons, c’est pas une petite bousculade qui va la faire tomber, au contraire même. « Pardon, je suis désolée je ne vous avais pas vu. » Elle s’excuse en replaçant une mèche de ses cheveux correctement. C’est un parfait inconnu qu’elle a devant elle quand elle relève le regard pour enfin l’apercevoir. Bien, tant mieux. Elle ne sait pas trop ce qu’elle aurait fait si ça avait été quelqu’un de sa connaissance. Elle a toujours moins de mal avec ceux qu’elle ne connaît pas, sans trop savoir comment l’expliquer d’ailleurs. « Je peux faire quelque chose ? Vous offrir un café par exemple pour me faire pardonner ma maladresse ? » Pause. Quiconque connaît la jeune femme et assisterait à cette scène se demanderait si c’est vraiment de Carter qu’il s’agit là et non pas sa jumelle angélique. Elle n’est pas comme ça normalement, pas ce genre de fille, elle n’est pas gentille comme ça alors pourquoi. Marre d’être seule, sans amis, sans personne peut-être. Elle fait juste ce qui lui passe par la tête là, elle fait ce qui lui semble normal, ce que les personnes normales font dans ce genre de circonstances elle suppose.

Elle l’a juste bousculé, c’est pas grand chose. Mais on comprend facilement qu’elle n’est pas dans son état normal quand pour se faire pardonner, elle lui propose de lui offrir un café. Ca, c’est pas carter. Non, la rousse, en tant normal, elle aurait piqué une crise, elle lui aurait fait comprendre qu’elle n’a rien fait de mal, que tout est de sa faute. Encore une preuve que les choses sont bien différentes dans la vie de la jeune femme aujourd’hui. Faut croire qu’elle devient gentille, ironie quand on sait qu’elle est normal la fille sans coeur que tous imagine. Ils voudraient bien être tous surpris s’ils la voyaient en cet instant. Mais au moins, il ne lui met pas de vent, il accepte même cette proposition sortit un peu de nul part. C’est vrai qu’elle n’est qu’une inconnue, elle pourrait être une tueuse en série ou autre qui cherche des victime. Ca la fait rire intérieurement cette pensée mais elle sourit, contente qu’il accepte. Un sourire qui demeure, elle reprend place là où elle était quelques secondes plus tôt. Maintenant qu’elle a quelqu’un avec qui partager un café, ils n’auront qu’à appeler un serveur pour se faire servir, c’est ça aussi la magie des cafés, ne pas avoir à se déplacer. Elle range quelque peu ce qu’elle avait pu sortir, comme si elle prévoyait de travailler avant ça. Douce idylle, elle qui voulait simplement se changer les idées en fin de compte, elle aura très bien réussi. Puis voilà qu’il vient lui poser une question qu’elle ne sait pas comment prendre. Un reproche, une constatation, ça peut être un peu tout et n’importe quoi finalement et la voilà qui ne sait pas trop quoi dire, qui ne sait pas si elle doit rire ou s’insurger de ce qu’il semble penser d’elle. Elle ressemble vraiment à ce genre de filles qui se pavanent pour draguer tout ce qui bouge ? Bon, c’est vrai que les tenues qu’elle porte bien souvent ne font rien pour faire penser le contraire, mais aujourd’hui, elle a fait soft, autant qu’elle puisse en tout cas. « Ce n’est en rien une technique de drague. le jour où je m’abaisserais à cela, il faudra surtout penser à me faire enfermer parce que je serais tombée bien bas. » Elle dit ce qu’elle pense, sans retenu, comme toujours. Elle veut juste qu’il comprenne qu’elle n’est pas ce genre de fille, qu’elle fait juste ça par gentillesse, aussi surprenant que cela puisse paraître, autant que cela contraste avec les traits qu’elle veut froid de son visage. Depuis le temps, elle a bien compris qu’elle ne pourra jamais empêcher les gens de penser du mal d’elle, elle ne fait rien non plus pour les contredire, préférant toujours avoir la paix plutôt que d’attirer les gens pour qu’ils viennent lui parler. « Carter, étudiante qui ferait mieux d’être en cours sans doutes. » Juste sans doutes parce que l’envie est bien loin d’être là, plus tard, un autre jour, on sait jamais ce que l’avenir réserve de toute manière.

Elle n’est pas le genre de personne gentille qui ira offrir un café à la première personne venue, se serait mal la connaître, ne pas la connaître du tout que de penser cela de Carter. Elle est un peu égoïste sur les bords, il faut bien le reconnaître et pourtant, aujourd’hui, voilà qu’elle fait une exception, qu’elle se montre sous un nouveau jour. Peut-être parce qu’elle est un peu fautive dans cette rencontre, si elle avait regardé où elle allait, ils ne se seraient probablement pas rentré dedans. Oui, c’est sans nul doutes ça, il n’y a pas à réfléchir plus que ça. C’est pas une technique de drague et elle ne se gêne pas pour le lui faire savoir. Elle n’est pas comme ça, elle ne va pas s’abaisser à ce genre de choses, elle vaut mieux que ça l’étudiante. Elle avait pas saisit la plaisanterie en tout cas mais c’est pas pour ça qu’elle regrette le ton peut-être un peu trop direct de sa voix. Dire ce qu’elle pense en toutes circonstances, c’est un peu ce qui la caractérise si bien, qui fait d’elle qui elle est, on aime ou non, c’est pas son problème. La politesse finit par s’imposer, elle se présente simplement. Prénom, ce qu’elle fait dans la vie, l’essentiel en soit, ils ne se connaissent pas après tout, pourquoi chercher compliqué. L’esquisse d’un sourire apparaît sur ses lèvres au terme employé pour désigner le fait qu’elle ne soit pas en cours alors qu’elle le devrait très probablement. « Je ne sais pas si on peut dire que je sèche alors que c’est moi qui suis censée donner un cours, vous en pensez quoi ? » On dit des élèves mais parfois, les professeurs ne sont pas mieux. C’est son cas en tout cas, le problème de la double casquette d’étudiante et de professeur assistante sans doutes. Elle se permet des libertés qu’elle ne devrait pas avoir, ça lui posera problème un jour, elle en a bien conscience. Au moins, dans son malheur si on peut appeler ça ainsi, elle est tombée sur un architecte, pas quelqu’un de l’Université qui pourrait lui faire la morale quant à sa non présence dans les locaux où elle devrait donner son cours. « Je suis en enseignement primaire pour ce qui est de ma Majeure et je fais russe en Mineure. Je l’enseigne aussi en tant que professeur assistante. » Et autant dire que ça lui prend pas mal de temps rien que ça, si on ajoute l’équipe de natation, le cheerleading, elle n’a pas beaucoup de temps pour sortir, pour penser à elle. Une des raisons qui la pousse à prendre ce temps sur le temps, elle juste opter sur les cours, comme elle aurait pu le faire avec un entraînement. « Je suis aussi dans l’équipe de natation du campus et capitaine des cheerleaders. » Pourquoi l’ajouter ? Elle l’ignore, une façon sans doutes de se trouver réellement une excuse quant au fait qu’elle préfère être à la terrasse d’un café plutôt qu’à l’Université. « Vous êtes allés à Columbia ? » Ils ne semblent pas avoir une grande différence d’âge, ils auraient pu se croiser.